Quand l'orage a démarré j'étais en train de faire quelques courses au Nilgril's comme tout occidental qui se respecte tout en détestant parfaitement cet endroit parce que tu es suivi à chacun de tes pas de l'entrée à la caisse. C'était vraiment très violent, pas prévu, donc rien du tout pour me protéger. Les rues en travaux ruisselaient de boue et j'avais dix minutes pour aller au dining-room de l'ashram. Alors je me suis frayée un chemin au milieu de la foule entassée et je me suis enfoncé un sac sur la tête et en évitant au maximum les lacs en train de se créer j'ai fait un sprint. Je suis arrivée aussi trempée qu'après un bond dans l'océan mais peu importe. J'ai eu bien raison car la pluie n'a pas cessé pendant des heures avec des coups de tonnerre qui m'ont vraiment fait peur. Surtout pour revenir de nuit, en vélo sans lumière. Le pire a été de traverser les ponts dans le quartier de Vathipukam, parce que l'eau avait monté et ma roue s'enfonçant de 20 centimètres, j'ai dû descendre de vélo et coller mes jambes dans ce mélange d'eau, de boue et de détritus visqueux. Franchement, je n'ai pas rigolé.
Le lendemain lever tôt pour aller avec Nick à Gingee, à 65 km de Pondichery. Nous avons pris un bus bien pourri qui avait dû vivre la nuit d'orage car mon siège avait fait éponge et je me suis mouillée les fesses pendant tout le trajet en prenant toutes les éclaboussures des flaques traversées dans les yeux car les fenêtres ne se ferment pas et il n'y a ni porte à l'avant, ni porte à l'arrière: un vrai tape-cul.
Pour vous donner une idée de la quantité de pluie, il suffit d'observer l'image:
Bref, malgré tout le trajet s'est très bien passé et franchement, vu le prix dérisoire de 30 roupies par personne alors qu'un rickshaw à pondy te prend maintenant 120 roupies pour deux kilomètres, le choix est vite fait: mieux vaut une grande escapade qu'un déplacement à 5 kilomètres de la ville. Le bus servait aussi de ramassage scolaire et à chaque arrêt des petits vendeurs montaient pour vendre qui des beignets, qui des citrons, qui des pop-corns...un vrai cinéma! A l'extérieur, de même, on traverse de jolis petits villages où le matin on peut voir toutes les petites filles et les étudiantes se préparer pour l'école puis partir en groupe attendre leur moyen de locomotion. Ce jour ça faisait un peu mal au coeur de voir l'état des chemins imbibés de boue avec toutes les affaires des gens noyées...Plus on va dans les terres, plus les gens vivent de manière traditionnelle. C'est l'occasion de découvrir les chevrières, les travailleurs dans les rizières:
Ici nous sommes déjà à Gingee, au pied du Fort Rouge. C'est une vision magnifique avec les montagnes, les arbres; les couleurs des saris...Mais il faut aussi voir la réalité d'un travail extrêmement minutieux, pénible, sous un soleil de plomb avec un rythme incessant. Alors prendre une photo sans non plus s'éterniser à regarder.
J'ai dû demander plusieurs fois à des gens dans le bus de m'aider à savoir quand était l'arrivée pour Gingee: cela n'a pas éré une mince affaire car la plupart des gens ne parlent que le Tamoul. Cependant ils finissent par comprendre le nom de la ville, sauf que c'est moi qui ne la comprenait pas car ce qui est " Gingee" pour moi, est " Singee" ou truc comme ça pour eux...Bref, en descendant du bus, nous nous sommes retrouvés dans le tumulte d'une ville très animée, sur une voie très passagère et extrêmement polluée. Je me suis orientée avec le feeling, sans savoir que j'étais sur le bon chemin pour atteindre les forts, temples et citadelles. Mais vu que nous venions du sud et que je n'avais pas aperçu grand chose à l'entrée, j'ai pensé, à juste titre que ça ne pouvait qu'être au nord . L'ouest et l'est ne m'ont pas effleurée!
Bref, en marchant assez longuement sous un soleil de plomb, nous avons eu le choc d'un arrêt brutal de la ville pour recevoir en plein visage le spectacle d'une nature éblouissante: montagnes, collines, lacs, animaux paisibles, et surtout: vision panoramique sur des monuments très haut perchés. Au début j'étais prise par la magnificence du paysage, et ayant oublié mon guide du routard, ainsi que mes lunettes, je ne pensais pas que j'allais faire tous ces kilomètres et ces montées monumentales dans la journée.
Chaque petit arrêt pour souffler et prendre un petit bain d'ombre était l'occasion d'admirer le paysage environnant et surtout de prévoir les prochaines visites grâce à la perspective qui nous permettait d'avoir la géolocalisation des autres monuments.
Le fort en lui-même est magnifique et dépasse sans aucune comparaison possible l'intérêt de la visite du Danish fort de Tranquebar!
A l'intérieur on peut voir de vieilles peintures en voie d'effacement ( et absolument pas protégées des écritures contemporaines), de belles sculptures en demi rond-de-bosse, des cours semblables à des cloîtres...
Tout est beau, calme ( lorsque les indiens ne débarquent pas avec leur téléphone portable insupportable en mode radio et en braillant comme des cons sans aucun respect pour le lieu et pour les personnes qui visitent!) et le regard sur l'environnement peut se disperser et se perdre dans une longue contemplation du lieu. C'est en général la soif et la chaleur qui rappellent qu'il est temps de changer d'endroit mais sinon on y resterait bien plus longuement.
Nous avions faim en redescendant donc nous sommes repartis vers la ville chercher un endroit où nous restaurer. Pas simple et il a fallu marcher encore longuement entre la pollution et la chaleur pour trouver une petite cantine. Il a fallu laver notre feuille de bananier avant de pouvoir être servi d'un petit thali très moyen mais suffisant en quantité. Une indienne m'aidait à comprendre les rites du milieu et est venu se planter à mes côtés jusqu'à ce que j'arrive à faire correctement les gestes. J'étais mal à l'aise car elle rigolait et me regardait manger avec de grands yeux en me posant mille questions moitié tamoul moitié anglais et je n'avais qu'une envie, rester un peu tranquille et me reposer le temps de ce petit repas. Evidemment, j'essayais de manger avec la main droite mais tout m'échappait donc lorsque j'ai été tranquille j'ai plongé ma main gauche dans le riz et tout de suite ça a été plus simple. A côté de moi, Nick souffrait de la forte teneur en épices du plat et buvait verre d'eau sur verre d'eau. Pour ma part, ça allait très bien.
Ensuite mon compagnon de route a préféré prendre un rickshaw pour nous reconduire sur les lieux de la visite. Voyant qu'il était en mode digestion j'ai accepté et n'ai pas regretté vu le faible prix par rapport à Pondicherry où je crois que les conducteurs sont de fieffés voleurs pour les touristes. Malheureusement, j'ai oublié une chose essentielle: acheter de l'eau!
J'ai donc dû faire la seconde montée de la Citadelle en venant du Inner Fort, en puisant dans mes réserves et en économisant les quelques centimètres d'eau qu'il me restait. Plus jamais je ne referai une telle bêtise car c'est vraiment extrêmement dangereux. Je suis arrivée épuisée:
Pour atteindre la citadelle il faut monter des centaines de marche et avant cela, la visite des monuments et des jardins qui le bordent dure assez longtemps tant il y a de belles choses à voir: architecture, nature, singes absolument désopilants qu'il fallait vraiment maîtriser pour ne pas se faire dépouiller!
J'en ai pris un la patte en train de s'accrocher à l'arrière de mon sac, et c'était franchement rigolo car je l'ai regardé droit dans les yeux comme une maman en lui disant " nan nan nan"!
Mais le moment le plus fort avec ces singes ce fut à mi-parcours: des familles entières étaient établies autour d'un tout petit temple; Les mamans allaitaient des bébés de quelques jours, pendant ce temps, de plus jeunes déshabillaient les statues et se roulaient dans les saris dorés. J'ai vraiment adoré passer ces instants en leur compagnie en tentant de communiquer avec eux. Quand ils ne sont pas contents ils te soufflent dessus comme un chat en faisant un roulement de la gorge: en clair quand c'est comme ça, tu les gonfles et mieux vaut ne pas insister, par respect d'abord, par sécurité ensuite.
Depuis que je suis allée ici, je sais pourquoi maintenant il vaut mieux laisser les statues nues!
Bref, nous avons eu le courage d'aller jusqu'au bout de cette montée. J'ai réussi par de amples respirations à ralentir mon coeur qui battait bien trop vite certainement à cause de l'effort et de la deshydration. Je vous mets ici de quoi vous laisser imaginer la hauteur du lieu:
En bas à gauche vous avez une vision sur les cours intérieures, la tombe musulmane; un peu au centre derrière les énormes arbres ( eau verte) sur le gymnasium et au fond à droite sur le temps par lequel nous avons fini la journée!
Cette petite video permet d'avoir une vision panoramique qui peut donner le vertige!
Imaginez le nombre de marches à monter en plein soleil et vous aurez tout de suite compris que s'il vous venait à l'idée de vous rendre à Gingee pour ces visites en haute altitude, il faudra prévoir deux litres d'eau par personne, une casquette, une bonne paire de chaussure de randonnées ouvertes et surtout ne pas y aller seul. La montée est dangereuse et interdite après 3 heures de l'après-midi: ce qui oblige à affronter la chaleur...Cela dit, une petite fille est montée pied nus sur ces pierres brûlantes mais il ne faut pas comparer nos pieds de bébé et les pieds des indiens habitués à fouler la terre de tous lieux.
Seule la soif oblige à redescendre sinon j'y serais bien rester sans rien faire, juste posée entre deux pierres de cet ensemble architectural mêlant forts, temples, cloîtres, statues...
La descente a été douloureuse pour les genoux et nous avons pensé que nous devions arrêter toute visite si nous ne trouvions pas d'eau. Heureusement, de l'eau filtrée était gratuitement à disposition à l'accueil et nous avons chacun bu presque d'un trait presque deux litres d'eau!
Nous sommes donc repartis très sereins, en refaisant un tour dans le jardin au milieu des arbres majestueux.
A pied, nous avons suivi la route que nous avions repéré depuis notre point de vue de la citadelle pour arriver au grand temple. Encore une fois nous avons été saisi par la qualité du lieu, l'atmosphère propice à la méditation, à la lenteur, à la contemplation. Des étudiants révisaient ici et là, entre deux statues, en haut de quelques marches ornées de sculptures de ganesh et autres divinités.
On aperçoit au loin le sommet que nous venions de quitter et nous avons ainsi pu prendre la mesure de notre journée de visite-randonnée:
J'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir les murs sculptés, les statues, les beaux escaliers de pierre dans un silence parfait...Vive la saison non touristique!
Ensuite nous sommes allés nous poser dans le jardin faisant face au temple, entouré des forts, des montagnes de roches empilées. Nous avons profité d'un bref repos bien mérité au milieu de singes jouant à sauter dans l'eau et à faire des pitreries comme des enfants.
Il a fallu repartir sur la route pour tenter de rejoindre la ville et trouver le lieu où nous devions prendre le bus du retour. Le début a été un peu dur car aucun rickshaw à la ronde. Finalement nous en avons arrêté un qui nous a déposé sur le lieu où nous devions attendre. Le problème a vite surgi: tous les bus passant et s'arrêtant ne signalaient aucune destination en anglais. Du tamoul, rien que du tamoul, et très peu de personnes comprenant que nous désirions aller vers Pondi. Ils nous faisaient des signes que " non, ce bus n'allait pas où nous voulions aller", pendant que d'autres tentaient de nous expliquer que l'on pouvait prendre ces bus jusqu'à une ville dont j'ai eu du mal à comprendre le nom avant de prendre un autre bus vers Pondi. Mais moi j'étais sûre que les directs existaient donc pendant que Nick avait démissionné- ce qui arrive souvent quand il s'agit de trouver une solution- j'ai fini pas trouver une bande d'étudiants qui m'ont dit que c'était le bus 158. Ouah! les chiffres comme langue universelle! Sauf qu'une heure après, nous étions toujours plantés en plein cagnard à poireauter en respirant la pollution de l'avenue, rouges comme des écrevisses. J'ai bondi sur un homme avec une valisette en me disant que celui-là avait une tête à savoir parler l'anglais ce qui fut le cas et quel ne fut pas mon bonheur à voir qu'il allait lui aussi à Pondi! Il a téléphoné au bus stand confirmant que le bus allait arriver...une demi-heure après! C'est donc bien claqués que nous avons repris pendant deux heures la route dans un bus bondé, sans climatisation, à 30 kilomètre heure maximum, mais heureux d'être assis ce qui n'était pas le cas de tout le monde. J'ai très vite oublié la crasse des sièges et du sol et j'ai comaté jusqu'à l'arrivée en observant des indiens super stressés, regardant leur montre toutes les deux minutes et tapotant les barres nerveusement. Le stress gagne l'orient, en attendant moi, j'avais le souvenir de ma super journée et j'étais super zen ce qui m'a pour une fois réconfortée.
Pas simple de récupérer cependant son vélo de nuit sans lumière et de tenter de traverser des grandes avenues super dangereuses. J'ai oublié de dire que ma journée avait commencé par un accident sans gravité mais qui m'avait quand même un peu troublée: une moto avait déboulé à fond derrière un bus et nous nous sommes rentrés dedans. La chance que j'ai eue c'est que ma roue avant s'est coincée droite entre sa roue avant et l'autre partie de sa moto et je suis restée plantée droite. Un quart de seconde avant ou après, je finissais encore à terre! Du coup le soir j'étais peu rassurée et voyant l'impossibilité à voir quoique ce soit et ne supportant plus d'être frôlée par des camions à fond ou des rickshaws, j'ai coupé en angle droit la ville et pris le petit canal. Nick m'a suivie voyant que ce n'était pas le moment de me contredire et j'ai finalement pu retrouver la route du petit restau en front de mer où nous avons picoré dosa et paroota avant de reprendre le vélo pour traverser mon petit quartier traditionnel.
Inutile de vous dire que j'étais la plus heureuse du monde sous ma douche et que ce matin, en mettant mon réveil à 6h pour aller travailler au jardin de l'ashram je n'étais pas tout à fait réveillée dans mes tongues. D'ailleurs j'ai passé une matinée le moral sous les fleurs de successfull for the future, j'ai abandonné mes camarades au dining-room de l'ashram où je suis allée manger seule avec des inconnus en silence dans une petite pièce et je suis revenue direct à la guest house pour écrire et me passer les nerfs.
C'est comme ça, quand je suis fatiguée, mieux vaut ne pas trop m'embêter, je sais ce qui me fait du bien: vivre mon temps et mon espace à moi...
J'ai cependant eu du plaisir en nettoyant les fleurs à parler avec une nouvelle fille de la maison qui vient de l'Equateur et avec qui je pense partager ma prochaine sortie: Mahaballipuram.
Je réouvre ce message pour évoquer malgré tout un moment magique ce matin. J'ai participé comme tous les jeudi à la puja commune du jardin. Le kolam dessiné était magnifique mais le bouleversement a eu lieu quand un homme derrière moi s'est mis à chanter sous forme de mantra une chanson qu'il a lui même composé pour célébrer l'offrande des fleurs à Mère. Sa voie était d'une pureté inouïe avec une telle vibration que je n'ai pas pu arrêter mes larmes qui coulaient d'émotion. Par la suite, il m'a montré sur la demande d'une travailleuse, des sculptures sur le sable qu'il fait autour de l'étang de Sri Aurobindo. Ses représentations de ganesh et des autres divinités sont d'une perfection absolue et jamais il n'a pris un seul cours. C'est le genre de rencontre qui laisse un profond respect car tout est humilité chez cet homme qui passe chaque jour son temps à arroser les fleurs du jardin et à faire les bouquets pour l'ashram.
C'est ce genre de petites lumières qui ravivent mes braises et oublier ces moments serait un sacrilège tant ils donnent justement à sentir les bons côtés d'une vie qui doit être autre chose qu'une cristallisation dangereuse sur des petits détails négatifs. Cela dit, si parfois l'on n'arrive pas à se détacher de son mal-être c'est qu'il a ses raisons d'être, bien souvent plus profondes que les racines qui dépassent du sol...Alors je ne veux pas non plus juger ce qui fait partie de la lumière: les fissures et les brèches qui la laissent passer de temps en temps...Il suffit juste de savoir la saisir...et ne pas la garder trop longtemps pour ne pas être trop ébloui et ne plus rien voir de la réalité.
Le lendemain lever tôt pour aller avec Nick à Gingee, à 65 km de Pondichery. Nous avons pris un bus bien pourri qui avait dû vivre la nuit d'orage car mon siège avait fait éponge et je me suis mouillée les fesses pendant tout le trajet en prenant toutes les éclaboussures des flaques traversées dans les yeux car les fenêtres ne se ferment pas et il n'y a ni porte à l'avant, ni porte à l'arrière: un vrai tape-cul.
Pour vous donner une idée de la quantité de pluie, il suffit d'observer l'image:
Bref, malgré tout le trajet s'est très bien passé et franchement, vu le prix dérisoire de 30 roupies par personne alors qu'un rickshaw à pondy te prend maintenant 120 roupies pour deux kilomètres, le choix est vite fait: mieux vaut une grande escapade qu'un déplacement à 5 kilomètres de la ville. Le bus servait aussi de ramassage scolaire et à chaque arrêt des petits vendeurs montaient pour vendre qui des beignets, qui des citrons, qui des pop-corns...un vrai cinéma! A l'extérieur, de même, on traverse de jolis petits villages où le matin on peut voir toutes les petites filles et les étudiantes se préparer pour l'école puis partir en groupe attendre leur moyen de locomotion. Ce jour ça faisait un peu mal au coeur de voir l'état des chemins imbibés de boue avec toutes les affaires des gens noyées...Plus on va dans les terres, plus les gens vivent de manière traditionnelle. C'est l'occasion de découvrir les chevrières, les travailleurs dans les rizières:
Ici nous sommes déjà à Gingee, au pied du Fort Rouge. C'est une vision magnifique avec les montagnes, les arbres; les couleurs des saris...Mais il faut aussi voir la réalité d'un travail extrêmement minutieux, pénible, sous un soleil de plomb avec un rythme incessant. Alors prendre une photo sans non plus s'éterniser à regarder.
J'ai dû demander plusieurs fois à des gens dans le bus de m'aider à savoir quand était l'arrivée pour Gingee: cela n'a pas éré une mince affaire car la plupart des gens ne parlent que le Tamoul. Cependant ils finissent par comprendre le nom de la ville, sauf que c'est moi qui ne la comprenait pas car ce qui est " Gingee" pour moi, est " Singee" ou truc comme ça pour eux...Bref, en descendant du bus, nous nous sommes retrouvés dans le tumulte d'une ville très animée, sur une voie très passagère et extrêmement polluée. Je me suis orientée avec le feeling, sans savoir que j'étais sur le bon chemin pour atteindre les forts, temples et citadelles. Mais vu que nous venions du sud et que je n'avais pas aperçu grand chose à l'entrée, j'ai pensé, à juste titre que ça ne pouvait qu'être au nord . L'ouest et l'est ne m'ont pas effleurée!
Bref, en marchant assez longuement sous un soleil de plomb, nous avons eu le choc d'un arrêt brutal de la ville pour recevoir en plein visage le spectacle d'une nature éblouissante: montagnes, collines, lacs, animaux paisibles, et surtout: vision panoramique sur des monuments très haut perchés. Au début j'étais prise par la magnificence du paysage, et ayant oublié mon guide du routard, ainsi que mes lunettes, je ne pensais pas que j'allais faire tous ces kilomètres et ces montées monumentales dans la journée.
Nous avons commencé par le Fort Rouge et surtout une première rencontre magnifique avec les singes de la région. Je me trouvais comme un petit enfant, m'extasiant de tout, du lieu, des couleurs, du comportement de ces singes que j'observais pour la première fois de ma vie en liberté.
Ici je vous donne la première image qui m'a fait fondre: la petite famille réunit dans un arbre.
Nous avons gravi pour découvrir toujours plus haut et toujours plus de beauté, les quelques centaines de marches qui mènent à ce premier fort:
Le fort en lui-même est magnifique et dépasse sans aucune comparaison possible l'intérêt de la visite du Danish fort de Tranquebar!
Tout est beau, calme ( lorsque les indiens ne débarquent pas avec leur téléphone portable insupportable en mode radio et en braillant comme des cons sans aucun respect pour le lieu et pour les personnes qui visitent!) et le regard sur l'environnement peut se disperser et se perdre dans une longue contemplation du lieu. C'est en général la soif et la chaleur qui rappellent qu'il est temps de changer d'endroit mais sinon on y resterait bien plus longuement.
Ensuite mon compagnon de route a préféré prendre un rickshaw pour nous reconduire sur les lieux de la visite. Voyant qu'il était en mode digestion j'ai accepté et n'ai pas regretté vu le faible prix par rapport à Pondicherry où je crois que les conducteurs sont de fieffés voleurs pour les touristes. Malheureusement, j'ai oublié une chose essentielle: acheter de l'eau!
J'ai donc dû faire la seconde montée de la Citadelle en venant du Inner Fort, en puisant dans mes réserves et en économisant les quelques centimètres d'eau qu'il me restait. Plus jamais je ne referai une telle bêtise car c'est vraiment extrêmement dangereux. Je suis arrivée épuisée:
Pour atteindre la citadelle il faut monter des centaines de marche et avant cela, la visite des monuments et des jardins qui le bordent dure assez longtemps tant il y a de belles choses à voir: architecture, nature, singes absolument désopilants qu'il fallait vraiment maîtriser pour ne pas se faire dépouiller!
Vas-y fais comme chez toi! |
![]() | ||
trop mignon mais super coquin! |
Depuis que je suis allée ici, je sais pourquoi maintenant il vaut mieux laisser les statues nues!
Bref, nous avons eu le courage d'aller jusqu'au bout de cette montée. J'ai réussi par de amples respirations à ralentir mon coeur qui battait bien trop vite certainement à cause de l'effort et de la deshydration. Je vous mets ici de quoi vous laisser imaginer la hauteur du lieu:
En bas à gauche vous avez une vision sur les cours intérieures, la tombe musulmane; un peu au centre derrière les énormes arbres ( eau verte) sur le gymnasium et au fond à droite sur le temps par lequel nous avons fini la journée!
Cette petite video permet d'avoir une vision panoramique qui peut donner le vertige!
Imaginez le nombre de marches à monter en plein soleil et vous aurez tout de suite compris que s'il vous venait à l'idée de vous rendre à Gingee pour ces visites en haute altitude, il faudra prévoir deux litres d'eau par personne, une casquette, une bonne paire de chaussure de randonnées ouvertes et surtout ne pas y aller seul. La montée est dangereuse et interdite après 3 heures de l'après-midi: ce qui oblige à affronter la chaleur...Cela dit, une petite fille est montée pied nus sur ces pierres brûlantes mais il ne faut pas comparer nos pieds de bébé et les pieds des indiens habitués à fouler la terre de tous lieux.
Seule la soif oblige à redescendre sinon j'y serais bien rester sans rien faire, juste posée entre deux pierres de cet ensemble architectural mêlant forts, temples, cloîtres, statues...
La descente a été douloureuse pour les genoux et nous avons pensé que nous devions arrêter toute visite si nous ne trouvions pas d'eau. Heureusement, de l'eau filtrée était gratuitement à disposition à l'accueil et nous avons chacun bu presque d'un trait presque deux litres d'eau!
Nous sommes donc repartis très sereins, en refaisant un tour dans le jardin au milieu des arbres majestueux.
A pied, nous avons suivi la route que nous avions repéré depuis notre point de vue de la citadelle pour arriver au grand temple. Encore une fois nous avons été saisi par la qualité du lieu, l'atmosphère propice à la méditation, à la lenteur, à la contemplation. Des étudiants révisaient ici et là, entre deux statues, en haut de quelques marches ornées de sculptures de ganesh et autres divinités.
J'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir les murs sculptés, les statues, les beaux escaliers de pierre dans un silence parfait...Vive la saison non touristique!
Ensuite nous sommes allés nous poser dans le jardin faisant face au temple, entouré des forts, des montagnes de roches empilées. Nous avons profité d'un bref repos bien mérité au milieu de singes jouant à sauter dans l'eau et à faire des pitreries comme des enfants.
Il a fallu repartir sur la route pour tenter de rejoindre la ville et trouver le lieu où nous devions prendre le bus du retour. Le début a été un peu dur car aucun rickshaw à la ronde. Finalement nous en avons arrêté un qui nous a déposé sur le lieu où nous devions attendre. Le problème a vite surgi: tous les bus passant et s'arrêtant ne signalaient aucune destination en anglais. Du tamoul, rien que du tamoul, et très peu de personnes comprenant que nous désirions aller vers Pondi. Ils nous faisaient des signes que " non, ce bus n'allait pas où nous voulions aller", pendant que d'autres tentaient de nous expliquer que l'on pouvait prendre ces bus jusqu'à une ville dont j'ai eu du mal à comprendre le nom avant de prendre un autre bus vers Pondi. Mais moi j'étais sûre que les directs existaient donc pendant que Nick avait démissionné- ce qui arrive souvent quand il s'agit de trouver une solution- j'ai fini pas trouver une bande d'étudiants qui m'ont dit que c'était le bus 158. Ouah! les chiffres comme langue universelle! Sauf qu'une heure après, nous étions toujours plantés en plein cagnard à poireauter en respirant la pollution de l'avenue, rouges comme des écrevisses. J'ai bondi sur un homme avec une valisette en me disant que celui-là avait une tête à savoir parler l'anglais ce qui fut le cas et quel ne fut pas mon bonheur à voir qu'il allait lui aussi à Pondi! Il a téléphoné au bus stand confirmant que le bus allait arriver...une demi-heure après! C'est donc bien claqués que nous avons repris pendant deux heures la route dans un bus bondé, sans climatisation, à 30 kilomètre heure maximum, mais heureux d'être assis ce qui n'était pas le cas de tout le monde. J'ai très vite oublié la crasse des sièges et du sol et j'ai comaté jusqu'à l'arrivée en observant des indiens super stressés, regardant leur montre toutes les deux minutes et tapotant les barres nerveusement. Le stress gagne l'orient, en attendant moi, j'avais le souvenir de ma super journée et j'étais super zen ce qui m'a pour une fois réconfortée.
Pas simple de récupérer cependant son vélo de nuit sans lumière et de tenter de traverser des grandes avenues super dangereuses. J'ai oublié de dire que ma journée avait commencé par un accident sans gravité mais qui m'avait quand même un peu troublée: une moto avait déboulé à fond derrière un bus et nous nous sommes rentrés dedans. La chance que j'ai eue c'est que ma roue avant s'est coincée droite entre sa roue avant et l'autre partie de sa moto et je suis restée plantée droite. Un quart de seconde avant ou après, je finissais encore à terre! Du coup le soir j'étais peu rassurée et voyant l'impossibilité à voir quoique ce soit et ne supportant plus d'être frôlée par des camions à fond ou des rickshaws, j'ai coupé en angle droit la ville et pris le petit canal. Nick m'a suivie voyant que ce n'était pas le moment de me contredire et j'ai finalement pu retrouver la route du petit restau en front de mer où nous avons picoré dosa et paroota avant de reprendre le vélo pour traverser mon petit quartier traditionnel.
Inutile de vous dire que j'étais la plus heureuse du monde sous ma douche et que ce matin, en mettant mon réveil à 6h pour aller travailler au jardin de l'ashram je n'étais pas tout à fait réveillée dans mes tongues. D'ailleurs j'ai passé une matinée le moral sous les fleurs de successfull for the future, j'ai abandonné mes camarades au dining-room de l'ashram où je suis allée manger seule avec des inconnus en silence dans une petite pièce et je suis revenue direct à la guest house pour écrire et me passer les nerfs.
C'est comme ça, quand je suis fatiguée, mieux vaut ne pas trop m'embêter, je sais ce qui me fait du bien: vivre mon temps et mon espace à moi...
J'ai cependant eu du plaisir en nettoyant les fleurs à parler avec une nouvelle fille de la maison qui vient de l'Equateur et avec qui je pense partager ma prochaine sortie: Mahaballipuram.
Je réouvre ce message pour évoquer malgré tout un moment magique ce matin. J'ai participé comme tous les jeudi à la puja commune du jardin. Le kolam dessiné était magnifique mais le bouleversement a eu lieu quand un homme derrière moi s'est mis à chanter sous forme de mantra une chanson qu'il a lui même composé pour célébrer l'offrande des fleurs à Mère. Sa voie était d'une pureté inouïe avec une telle vibration que je n'ai pas pu arrêter mes larmes qui coulaient d'émotion. Par la suite, il m'a montré sur la demande d'une travailleuse, des sculptures sur le sable qu'il fait autour de l'étang de Sri Aurobindo. Ses représentations de ganesh et des autres divinités sont d'une perfection absolue et jamais il n'a pris un seul cours. C'est le genre de rencontre qui laisse un profond respect car tout est humilité chez cet homme qui passe chaque jour son temps à arroser les fleurs du jardin et à faire les bouquets pour l'ashram.
C'est ce genre de petites lumières qui ravivent mes braises et oublier ces moments serait un sacrilège tant ils donnent justement à sentir les bons côtés d'une vie qui doit être autre chose qu'une cristallisation dangereuse sur des petits détails négatifs. Cela dit, si parfois l'on n'arrive pas à se détacher de son mal-être c'est qu'il a ses raisons d'être, bien souvent plus profondes que les racines qui dépassent du sol...Alors je ne veux pas non plus juger ce qui fait partie de la lumière: les fissures et les brèches qui la laissent passer de temps en temps...Il suffit juste de savoir la saisir...et ne pas la garder trop longtemps pour ne pas être trop ébloui et ne plus rien voir de la réalité.
il n'y a rien à rajouter à ce que tu as écrit .. tout est dit .. juste le plaisir de te lire et de ressentir un peu les mêmes émotions .
RépondreSupprimerTrès gros bisous.
Maman.