lundi 23 juillet 2012

Je vais tenter de récupérer mon retard: les pannes de courant et de wifi sont légion ici et il faut bien s'adapter. Par ailleurs, c'est si fatiguant de vivre en plein soleil, de faire des kilomètres à vélo d'un endroit à l'autre que lorsque je rentre, je n'ai pas spécialement l'énergie pour me mettre devant un écran.

Donc voilà...C'est mon anniversaire, ce 21 juillet! J'ai toujours eu du mal avec ces célébrations sauf que là, je me suis fait avoir car je me trouve dans un lieu où l'anniversaire est presque un jour saint. C'est le jour où l'on est le plus "ouvert", réceptif, et c'est justement ce jour où l'on peut s'ouvrir à de nouvelles énergies, projets de développement personnel...comme un cycle qui peut se répéter à l'infini sans se soucier de l'âge qui n'est qu'un décompte stupide élaboré par l'homme pour tenter de se situer sur une ligne du temps qui n'est en fait qu'un pur artifice..surtout restons dans ce qui s'appréhende, se visualise, ne tentons surtout pas d'imaginer que le vide est en réalité là où se trouve l'énergie la plus importante...Ce jour, j'ai compris l'objectif de la méditation, j'ai compris à quoi pouvait servir le silence, à quoi pouvait servir un anniversaire, à quoi pouvait servir de donner sans chercher à recevoir par la suite, j'ai compris ce qu'était l'accueil, j'ai compris que j'allais aimer mes anniversaires et ceux de mes proches...Et j'essaierai chaque fois de mettre un peu plus de pratique dans toutes mes théories.

Alors le don simple, ça peut être ça qui vous attend à la tombée de la nuit, donné par quelqu'un qui n'a pas grand chose mais a énormément: l'intention et le coeur...ça ne se mesure pas parce que l'on ne peut voir ni le début et la fin, ça ne se compte pas parce que rien ne peut l'être, ça ne se discute pas parce que c'est une énergie qui distille tout son baume à l'intérieur...ça s'accepte, tout simplement:

Un anniversaire ça se commence avec rien, sans attente spéciale de la journée, juste effectivement une sensibilité à fleur de peau...on ne sait si c'est bon ou mauvais, s'il faut se protéger plus ou faire confiance à tous, s'il faut le dire ou pas...Alors j'ai décidé d'aller travailler comme tous les samedi au jardin de l'ashram. Juste avant de prendre le bus, en sortant du Samadhi, mon ami italien est arrivé et m'a offert deux jolies fleurs venant de l'ashram. Je pensais que c'était interdit, mais il paraît que ce jour, c'est permis...offrir des fleurs dédiées à Mother, c'est offrir leur vibration, leur signification, leur intention...

Je suis allée donc faire ma cueillette hebdomadaire avec Veronika, et d'autres ashramites. Aucune différence avec les autres jours, toujours de la bonne humeur, des petites discussions sur la spiritualité et la vie entre deux arbres ou bosquets de fleurs et...beaucoup de chaleur!

Chaque fois c'est un feu d'artifice pour les yeux: tout blanc, puis tout violet, puis jaune, rouge...nos "trays" se remplissent en partenariat, on repart qui avec la récolte sous les bras, qui avec la récolte sur la tête. les femmes tamoul qui travaillent avec nous sont toujours d'une beauté fulgurante même dans leurs immenses chemises et leurs bouts de tissus troués adaptés au travail du jardin. Mais ce jour-là, il est vrai, je me sentais quand même un peu différente, heureuse certainement de ne pas avoir à penser comme en occident...mais encore ignorante de ce qu'était pour eux un jour d'anniversaire...

Etonnamment, ce jour-là, la table était presque vide, nulle fleur à nettoyer, aucun bouquet à faire...
 La maison aussi était vide...mais toujours aussi belle.

Puis on m'a appelée...vous vous souvenez cette porte, cette porte que certains ici voulaient ouvrir...et bien, elle était ouverte:
Ouverte sur le lac géant de lotus, ce lac qui environne l'île...aux oiseaux.
Et au loin j'aperçois une petite barque qui s'approche doucement, avec une certaine pénibilité même, au milieu de ces fleurs attachées au sol, emprisonnant rames et libérant les rires.
Cette barque a été mon premier cadeau d'anniversaire, ou plutôt mon deuxième car Véronika entre ces deux portes m'a offert une magnifique carte écrite en espagnol avec un petit collier fabriqué avec des graines de basilic sacré qu'elle avait ramené de l'Himalaya...J'étais déjà plus qu'émue et heureuse...mais quand je suis montée à mon tour pour presque deux heures avec mes deux amis pour aller glisser sur l'eau ( et ramer avec énergie!), j'étais pour ainsi dire aux anges. C'est comme si ma tête s'était ouverte en deux et que je recevais une lumière infinie à l'intérieur. L'eau en miroir, les oiseaux tourbillonnant au centre, le soleil sur les bras, le bruit des rames se battant avec les lotus et un environnement magnifique m'ont laissé un souvenir inoubliable...Nick n'a pu s'empêcher de faire un plongeon dans l'eau menaçant de nous faire basculer tous, mais nous avons été quittes pour une bonne partie de rire. Il est resté ensuite à sécher en position de lotus également à l'arrière, ressemblant à un Jésus trempé avec son corps tout maigre, sa barbe et ses grandes anglaises...

Cette parenthèse sportive m'a fait un bien fou...

Un merveilleux jus de papaye frais nous attendait et la maîtresse des lieux nous attendait à la table sur la grande terrasse où tous les jeudi nous avons l'honneur de participer aux Pudja et d'entendre les chants magnifiques priant en sanskrit la pluie de tomber...

Un signe pour me faire approcher, un livre tendu: la signification de l'anniversaire écrit par Mother aux étudiants sous forme de conversation...un temps obligé de lecture, un temps de silence où je me suis trouvée en confrontation avec mes idées d'avant, mes sombres idées autour de l'anniversaire...puis une porte fermée s'est ouverte, j'ai laissé cette lumière entrer...j'ai levé les yeux et un magnifique bouquet m'attendait et les ashramites autour me prenaient en photo...J'étais extrêmement touchée par la situation totalement imprévue le matin même. Extrêmement touchée aussi par ce que m'a racontée l'indienne Kirandi qui a connu la Mère et ses douces paroles, son accueil permanent pour les membres de l'ashram ce jour si particulier. Elle tenait même un registre avec tous les noms et les dates pour en manquer aucun: ce jour-là elle venait voir son protégé et pour rien au monde n'aurait passé outre ce temps. D'ailleurs, si une personne venait à lui dire qu'à ce moment elle n'était pas disponible, elle lui demandait quand elle le serait..et elle était là, accueillante, un sourire aux lèvres, présente, attentive aux souhaits, aux mots de ses "enfants"...Elle guidait leur spiritualité avec une simplicité et une rigueur telle, que tous se sentaient envahis par l'énergie particulière de ce jour...
Kirandi ce jour a été cette "Mère"...elle m'a dit des mots que je n'avais jamais entendus tout en me faisant découvrir d'autres sens donnés par les fleurs composant mon bouquet...Je sais déjà que je reviendrai l'an prochain...je le sais parce que je n'ai pas fini d'emprunter ce chemin qui a un début dont j'ai perdu déjà les prémices et une fin qui n'existera pas, car lorsqu'une voie est ouverte et aide à grandir  pour toute la vie, et bien, elle reste ouverte....il n'y a qu'à pousser la porte, y revenir, y repenser...

Retour du jardin, je m'apprête à aller m'acheter à manger car je n'ai plus de tickets pour le dining-room. Là, c'est Nick qui s'approche et me demande mes "plans". Je n'en ai pas vraiment, à part que je dois mettre les fleurs dans un vase car elles ont chaud...comme moi. Mais je finis au Suguru Restaurant, invitée à manger un bon Thali!

L'après-midi je reçois un mail du Président de l'ashram de Tirunnamavalai , qui m'accepte pour trois jours alors qu'au départ, vu qu'ils avaient des problèmes d'eau tant ils souffraient de sécheresse au milieu de leurs montagnes, cela n'était pas possible. Mais j'avais réitéré ma demande en insistant sur le fait que j'avais vraiment en moi le besoin d'y aller avant de repartir en France. J'ai été entendue et je pars donc seule après-demain matin dans ces lieux sacrés au coeur du Tamil-Nadu.

Enfin, le soir, j'ai retrouvé ma nouvelle amie française Mélanie pour assister à des sketches à l'Alliance française joués par des étudiants en français de Bungalore. Mais c'était tellement nul et inaudible car le son était pourri, osons le dire, que nous avons arrêté le massacre. Il faisait nuit noire et les rues étaient non éclairées donc pour m'éviter de tomber dans les trous de cette ville perforée par les travaux, Mélanie m'a " donnée sa lumière" en me suivant avec son scooter jusqu'au grand restaurant la Promenade où j'avais réservé deux places sur la magnifique terrasse. Cela faisait deux mois que je n'avais pas mangé de poisson étant au régime strict végétarien de l'ashram et je n'ai pas voulu me priver ce jour-là. C'était très drôle car on nous a donné la table unique au milieu, surélevée par un podium. J'étais un peu gênée au départ de me retrouver comme ça plantée au milieu des autres mais nos échanges, notre bonne humeur nous ont vite fait oublier la situation. J'ai vraiment aimé ce que j'ai pris, par contre c'était "rat" si je puis dire, car les trois petits filets de poisson étaient accompagné d'un seul haricot, un quart de carotte, un petite fleur de chou fleur et trois cuillères à soupe de riz basmati. Mais c'était si bon que je gardais trois fois plus longtemps chaque bouchée que ce que je fais d'ordinaire à l'ashram même si j'ai pris l'habitude de manger très très lentement en me concentrant justement dans le silence obligatoire du lieu. ( Même si les bruits des ashramites seraient parfois plus agréables s'ils étaient couverts par quelques discussions animées et plaisantes...)

Il a commencé à pleuvoir ce qui nous a amené un peu de fraîcheur et cela ne nous a pas dérangées puisque nous avions fini le repas. Il faut savoir que le prix que j'ai payé correspond à presque 50 jours de nourriture à l'ashram!

Je suis revenue dans la nuit noire. En Inde on apprend à devenir nyctalope, et les yeux sont remplacés par la mémoire de la route du jour et par les oreilles. Je vois mille fois mieux qu'en France! Il faut dire que cela fait aussi un mois et demi que je travaille à la clinique de la Vision Parfaite et que les exercices ont vraiment amélioré la qualité de ma vue qui pourtant n'était pas si catastrophique que cela. Bref, vélo entre les gens endormis par terre, évitant les filets des pêcheurs tendus d'un bout de la rue à l'autre sur plusieurs kilomètres, les chiens kamikases, les poulets, les trous, les enfants qui vont d'une maison à l'autre avec juste un petit collier entre les fesses pour vêtement et surtout les petites motos sans phare,et les vélos roulant comme moi à l'aveugle. Mais j'arrive toujours entière, et ça commence même parfois à me plaire ces petits moments où la vue passe à un autre niveau.

C'est là que j'ai trouvé mon dernier petit cadeau de la journée coincé dans la clenche de ma porte composé d'un bout de papier toilette pour l'emballage, d'un tout petit bout d'écorce, de quelques brins d'encens au santal- mes préférés- et d'un sachet de tisane bio au basilic sacré encore!

J'ai donc passé une journée magnifique que je n'oublierai pas.

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